La question de la participation
(Billet publié initialement le 12 mars 2008)
François Bonnet, le rédacteur en chef du média participatif en devenir « MediaPart » a posé la question, centrale, de la participation des internautes dans son dernier billet intitulé « Les dérives de la participation ».
On perçoit dans le post de François Bonnet sa déception quant au niveau de qualité des commentaires qui sont postés sous les articles de MediaPart. La réaction est normale, les fondateurs de Rue89 avaient fait le même constat un an auparavant : excités par l’idée (qu’ils avaient partagée avec Edwy Plenel et François Bonnet) de proposer une tribune aux citoyens, ils avaient fait le pari que les Français, qui écrivent sur AgoraVox ou sur leurs millions de blogs, n’attendaient qu’un vecteur amélioré pour publier leurs informations, forcément oubliées ou méprisées par les journalistes traditionnels.
Hélas, la réalité est toute autre. Comme le décrit très bien Narvik, personne n’a encore trouvé ces fameux journalistes amateurs, ou journalistes citoyens. La raison est simple et je l’ai déjà maintes fois exprimée dans ce blog : être journaliste, c’est une occupation à plein temps, un métier pour parler vulgairement. Et c’est un métier de plus en plus difficile (mais c’est un autre sujet).
Quant aux commentaires dont François Bonnet se désole sur leur qualité, j’ai répondu sur MediaPart l’erreur qu’il y aurait à les réprimer d’emblée. Le débat écrit n’est pas –c’est regrettable mais là n’est pas la question- à la portée de tout le monde. Quand il existe, il faut s’en servir mais lorsqu’un internaute poste un simple « je suis d’accord », le geste a du sens. C’est un privilège de l’Internet par rapport aux autres médias et ça indique déjà que l’internaute a lu, en entier, l’article et que cet article lui a plu, lui a été utile dans sa réflexion. Pétard, je donnerai cher pour recevoir aussi facilement des commentaires à tous les articles que je publie dans mon journal !
Donc, il faut bien faire attention à cette question de la participation, à leur place dans la construction de ces nouveaux médias. À mon sens, l’un des tous premiers devoirs de ces médias contributifs est bien d’aller chercher la contribution, là où elle n’aurait pas émergée seule. De la susciter, de la magnifier et de lui donner du sens, pour donner la parole (au sens premier et noble) à des gens qui en sont mécaniquement et culturellement privés. La participation n’est pas l’ennemie du journaliste, la participation utile a besoin du journaliste pour exister.